BD jeunesse : nos conseils pour bien choisir par âge et styles

Tous les ans, la France accueille à Angoulême le festival international de la BD. Un grand moment de rencontre et d’échange pour les passionnés de bulles de tous âges et de tous horizons. Pour certains parents, la BD rappelle des heures de lecture, parfois en cachette lorsque ces ouvrages n’appartenaient pas à la culture familiale. Aujourd’hui, la bande dessinée a pris du galon et se hisse au rang de neuvième art. Fantastique, historique, humoristique, éducatif, le rapport texte/image ne cesse d’explorer toutes les voix narratives et d’embarquer son jeune public dans ses aventures et créations visuelles et formelles. L’école franco-belge classique côtoie de nouveaux artistes qui cassent les découpages et vadrouillent à travers les cases. Quels sont les attraits de la BD pour les enfants et jeunes lecteurs et quels ouvrages leur proposer en fonction de leur âge ?

État des lieux de la BD jeunesse

Avec le confinement, le livre jeunesse et la BD en particulier avaient affiché de très beaux scores en librairie. Même si le soufflé est un peu retombé (- 10% d’après l’enquête GfK x NielsenIQ d’octobre 2024), la lecture de BD reste prépondérante chez les 6-12 ans. En 2023, la sortie des derniers Astérix (L’iris blanc) et Gaston Lagaffe (Le retour de Lagaffe) avaient dynamisé les ventes, mais l’effet nouveauté ne s’est pas renouvelé en 2024. Toutefois, malgré la baisse des ventes, la lecture de BD jeunesse demeure vivace. Pour preuve les linéaires de bibliothèques jeunesse régulièrement vidés de leurs collections graphiques !

Ainsi, le baromètre des prêts et acquisitions en bibliothèques publié par le ministère de la Culture en décembre 2024 pour l’année 2023 montre que deux séries jeunesse occupent les première et seconde places du palmarès, tous publics confondus. Il s’agit des séries Max et Lili (Dominique De Saint-Mars et Serge Bloch) et Mortelle Adèle (Mr Tan et Miss Pricky/Diane Le Feyer). Les auteurs de BD jeunesse Nob et Zep occupent quant à eux les 18ème et 19ème place dans le top 20 des livres les plus empruntés en France.

Les bibliothèques jouent un rôle important de diffusion du livre jeunesse, principalement pour les albums, les documentaires, la BD et les mangas. Bien installé dans des espaces publics chaleureux et douillets ou chez lui dans son coin lecture ou sa cabane, l’enfant peut vivre mille aventures et expérimenter le monde sur un mode symbolique qui favorise son développement psycho-cognitif.

La bande dessinée : une lecture riche et porteuse pour le développement de l’enfant

Une étude du ministère de la Culture et de la Communication (Département études et prospectives, 2015) pointait l’effet générationnel de la BD pour jeunes lecteurs. Ainsi, « la bande dessinée, aujourd’hui très massivement répandue chez les enfants – moins d’une personne sur dix n’en a pas lu dans la population des moins de 30 ans – conserve un caractère juvénile marqué car les taux d’abandon sont élevés dès l’adolescence : alors que 90 % des 11-14 ans déclarent avoir lu des bandes dessinées au cours des 12 derniers mois, ils ne sont plus que 50 % dès 15-17 ans, puis la pratique diminue régulièrement au fil des ans pour atteindre 9 % chez les 60 ans et plus. »

Longtemps stigmatisée, la lecture de la BD rallie désormais parents et enseignants autrefois réticents. Reléguée au rang de distraction plutôt que de lecture, la bande dessinée souffrait d’un regard élitiste résumant le livre jeunesse au roman d’édification. Traditionnellement, la littérature jeunesse s’est construite sur ce postulat éducatif. Une éducation morale et citoyenne jusque dans les années 70/80, qui perdure actuellement en parallèle de productions plus innovantes, mais aussi une éducation liée à la didactique de la lecture. L’idée étant de lire des textes pour apprendre à lire. Les bulles et les images étaient de fait exclues de l’acte canonique de lecture. Or, la compétence de lecture d’images existe bien à part en entière et le va-et-vient avec le texte produit un sens singulier et riche.

Aujourd’hui le rejet de la BD tend à disparaitre au profit d’une reconnaissance artistique et pédagogique. Christophe Lécullée, formateur d’enseignants du 1er degré interrogé sur France Culture (La Question du jour 18/03/22) précise ainsi qu’en lecture de BD « les enfants acquièrent la temporalité de la lecture qui quitte le présent et ils peuvent s’ancrer dans des univers mentaux différents ». En d’autres termes, lire une bande dessinée mobilise bien des compétences de lecture identiques à la lecture d’un texte seul (roman), notamment parce que cela favorise l’immersion narrative et développe des compétences de compréhension, d’analyse et d’interprétation.

La BD donne le goût de lire

Mais surtout, à l’heure où les jeunes se détournent de la lecture au profit des écrans, leur engouement pour la bande dessinée est salutaire. Ainsi, e-enfance indique sur son site que « les 7-25 ans passent six fois plus de temps sur internet qu’à lire. » De même le CNL (Centre national du livre) dans sa dernière enquête (Les jeunes français et la lecture, 2024) constate que « 39% des jeunes préfèrent consacrer leur temps libre à d’autres activités et 19% affirment ne pas aimer lire (+3 pts vs 2022) ». Toutefois, « quand ils lisent pour leurs loisirs, les jeunes se tournent prioritairement vers les BD et les mangas ». Il apparait donc évident que ces lectures occupent désormais une place fondamentale dans le lien, malheureusement de plus en plus ténu, entre les jeunes et le livre.

La BD pour les 6-12 ans constitue un formidable levier pour donner aux enfants le goût de lire et maintenir leur curiosité en éveil. Que ce soient des formats courts sous forme de strips (La Cantine de Nob), des BD plus classiques (Tintin, Astérix, etc.) ou encore des nouveautés du rayon fantasy. L’effet de surprise, humour comme aventure, procure un réel plaisir de lecture aux enfants. C’est probablement pour cette raison que le format en série est le plus répandu. Les enfants ont envie d’avoir la suite, de savoir ce qui va se passer, de suivre les péripéties de leurs héros et héroïnes préférés. On retrouve ce même principe dans le roman pour enfants qui lui aussi adopte le principe sériel : La cabane magique (57 volumes), Harry Potter (7), Matthieu Hidalf (6), etc.

Lecture de BD versus lecture de romans : mêmes bénéfices ?

Si la BD est une expression artistique à part en entière, elle ne peut être totalement assimilée à la lecture linéaire d’une œuvre romanesque. Il est intéressant d’étudier les arguments de Michel Desmurget, chercheur en neurosciences, à ce propos. Interviewé par Page-Éduc en partenariat avec Les Inrockuptibles, l’auteur de La fabrique du crétin digital (Seuil, 2019) évoque les bienfaits de la lecture dans le développement de l’intelligence des enfants. Dans son dernier ouvrage, Faites-les lire ! Pour en finir avec le crétin digital (Seuil, 2023), il liste avec précision les apports de la lecture dans l’éducation des enfants :

“[La lecture] agit massivement sur le développement intellectuel à travers le langage, les connaissances générales, la concentration, la créativité, les capacités de synthèse et d’expression orale, […] les régulations émotionnelles, l’empathie, ou la compréhension des autres et de soi-même. Au bout du compte, tous ces bénéfices influencent très positivement la réussite scolaire et [la] vie sociale.”

Selon Michel Desmurget, « si on considère le langage, les compétences en lecture et la réussite scolaire, alors l’effet livre est massivement positif, l’effet BD/mangas est nul et l’effet réseaux sociaux/blogs est négatif. » Le spécialiste fait ce constat en rapport avec la « pauvreté des contenus linguistiques rencontrés » sur les écrans. Concernant la BD et le manga, il explique que « là où il faut 10 à 20 livres pour [apprendre de nouveaux mots (1 000 pour 1 million lus)], il faut des centaines de BD ou mangas. » La lecture de la BD n’est pas remise en cause, elle est passionnante et enrichissante. En revanche, il semble primordial de développer des initiatives pour inciter les jeunes à lire aussi des romans : Le quart d’heure de lecture à l’école par exemple, l’opération Nuits de la lecture. Ces initiatives sont toutes transposables à la maison !

La BD jeunesse : les tendances actuelles

En librairie jeunesse, la BD représente 18% des ventes, sachant que 55% des ventes de livres sont des illustrés (GfK). La proportion d’ouvrages incluant texte et image est donc majoritaire à destination du public enfantin. L’entrée en lecture commence dès la petite enfance avec les albums cartonnés, imagiers et livres sonores. Rien d’étonnant à ce que les enfants conservent un rapport étroit avec l’image !

Et rien de plus naturel que d’aller vers la BD quand on débute l’apprentissage de la lecture. Habitué à observer et décoder les illustrations, l’enfant complète sa compréhension visuelle de la narration par les informations textuelles. Comme en lecture d’album, il dispose de deux vecteurs pour donner sens à l’histoire qu’il lit : l’image et le texte. À la différence qu’il s’y attelle désormais en autonomie, alors que les albums étaient lus par les adultes pendant la période pré-scolaire. La BD constitue une porte d’entrée privilégiée pour relever le défi de la lecture silencieuse vers l’âge de 6/7 ans.

Métamorphose et richesse de la BD aujourd’hui

Longtemps dominée par la tradition franco-belge, la bande dessinée sort de plus en plus des sentiers battus. Les classiques en grand format continuent d’enchanter les petits : Alix, Astérix, Boule et Bill, Cédric, Gaston Lagaffe, Iznogood, Les Légendaires, Lucky Luke, les Schtroumpfs, Spirou, Tintin, Yakari. Mais ils côtoient désormais, des formats plus petits et parfois volumineux à couverture souple. On y trouve aussi des strips, des comics, des webtoons, des romans graphiques… Signe que les auteurs n’ont de cesse d’explorer d’autres formes pour créer leur propre univers.

Les découpages en cases s’aèrent, se déroulent en page entière ou demi-page, débordent des cadres. Les textes s’allègent aussi et les onomatopées fleurissent, toujours aussi drôles pour rythmer la narration. Mais les enfants n’ont que faire de la querelle des classiques et des anciens, ils lisent de tout et passent allègrement d’un genre à l’autre, d’un Sylvain et Sylvette à Lightfall en passant par Kiki et Aliène ou encore Les sardines de l’espace.

Tendance à la « bédéisation » des romans jeunesse et classique

Autre tendance éditoriale : la traduction en BD de romans jeunesse à succès ou de classiques de la littérature générale.

Des romans jeunesse adaptés en BD

L’école des loisirs a confié à Rue de Sèvres le soin de proposer des bandes dessinées tirées de son catalogue de romans.

• La longue marche des dindes d’après Kathleen Kaar (10+) : le périple d’un jeune garçon réputé simple d’esprit qui traverse les États-Unis avec son troupeau de dindes en 1860.
• Séraphine d’après Marie Desplechin (10+) : le destin d’une apprenti sage-femme au XIXe siècle.
• Verte, Pome et Mauve d’après Marie Desplechin (7+) : les tribulations d’une petite sorcière de 11 ans qui découvre des pouvoirs dont elle ne veut pas forcément…

• Calpurnia d’après Jacqueline Kelly (8+) : la passion d’une jeune fille pour la biologie et les sciences au Texas en 1899.
• Le chat assassin d’après Anne Fine (7+). Le journal d’un chat qui a maille à partir avec sa famille suite à la mystérieuse disparition du lapin des voisins.
• Quatre sœurs d’après Malika Ferdjoukh (10+). La vie de famille des cinq sœurs Verdelaine, orphelines, vue successivement à travers le regard de chacune…

D’autres éditeurs proposent également une version BD de leurs romans phares comme L’œil du loup d’après Daniel Pennac (Nathan Bande dessinée), La cabane magique d’après Mary Pope Osborne (Bayard BD). Parfois le passage à la bande dessinée permet d’adresser des romans pour pré-adolescents ou adolescents à une cible plus jeune comme L’île du crâne d’après Horowitz (Jungle pépite), La rivière à l’envers d’après Jean-Claude Mourlevat (Jungle pépite), La quête d’Ewilan d’après Pierre Bottero (Glénat), Les petites reines d’après Clémentine Beauvais (Sarbacane)…

Les classiques de littérature en bande dessinée

Pour les tranches des 10+, on trouve aussi des classiques de la littérature générale. L’école des loisirs propose une collection « Illustres classiques » avec une sélection de dix titres : Les Hauts de Hurlevent, Jane Eyre, Moby Dick, Dracula, Les Quatre filles du docteur March, Don Quichotte, Le portrait de Dorian Grey… Chez Glénat, la collection « Les Grands classiques de la littérature en BD » reprend des chefs-d’œuvres littéraires comme Oliver Twist, Robinson Crusoé, Le Livre de la Jungle, Les aventures de Tom Sawyer, Un conte de Noël, Croc blanc, ainsi que de nombreux Jules Verne (Vingt mille lieues sous les mers, Le Tour du monde en 80 jours, Voyage au centre de la Terre). On trouve aussi chez Bamboo une adaptation de Marcel Pagnol, Le temps des secrets, accessible aux élèves de CM2.

Ces adaptations sont plutôt destinées à un public 10/13 ans +, en fonction de la maturité du lecteur et de son niveau de lecture.

Pluralité des genres en bande dessinée jeunesse

La bande dessinée pour enfants touche à tous les genres : humour, aventure, fantastique, réaliste, historique, documentaire…

Elle innove tout particulièrement pour renouveler le genre documentaire et docu-fiction en jeunesse.

• Histoire. On trouve la collection « Images doc » (Bayard Jeunesse) avec par exemple Antiquités et mythologies en BD, L’histoire de France en BD, Les grands explorateurs en BD etc. Des séries historiques de fiction remportent également un franc succès comme Les enfants de la résistance de Benoit Ers et Vincent Dugomier (Le Lombard), Complots à Versailles d’après Annie Jay, Les grandes vacances de Gwénaëlle Boulet (BD Kids)…
• Sciences : collection « Les sciences en BD » (Casterman) avec par exemple L’évolution de la vie. L’incroyable histoire des sciences (Les arènes BD), À la découverte de l’espace (Casterman).
• Arts : L’Histoire de l’art en BD (Casterman).

• Mythologie : Ulysse, Thésée, Persée, Orphée, Troie d’Yvan Pommeaux (l’école des loisirs), collection « La sagesse des mythes » (Glénat, tous publics), La mythologie en BD de Béatrice Bottet et Emilie Harel (Casterman).
• Géographie : L’incroyable histoire de la géographie (Les arènes BD), Geographia (Futuropolis, BnF éditions).

Place du manga, la bande dessinée japonaise, en France

Le marché du manga en France a connu une baisse notable en 2023, avec une diminution de 22,7 % des ventes par rapport à l’année précédente. Cette baisse serait la conséquence d’un retour à la normal après la pandémie de COVID, mais aussi de l’inflation qui incite les ménages à limiter leurs dépenses. Toutefois le manga pour enfants (6-12 ans) appelé kodomo reste populaire.

Parmi les titres adaptés au jeune public, on peut citer :

• Chi, une vie de chat de Konami Kanata (Glénat). Les aventures d’un chaton curieux découvrant le monde.
• Yotsuba & ! de Kiyohiko Azuma (Kurokawa Eds). Les péripéties d’une fillette espiègle explorant son environnement quotidien.
• Pokémon – La Grande Aventure (Kurokawa Eds). Adaptation fidèle de l’univers Pokémon, suivant les aventures de jeunes dresseurs.

• Animal Crossing – New Horizons (Soleil). Basé sur le célèbre jeu vidéo, ce manga suit les aventures d’une jeune fille sur une île déserte.
• Les Enfants Loups – Ame & Yuki (Kazé). L’histoire touchante de deux enfants mi-humains, mi-loups, cherchant leur place dans le monde (tiré du film d’animation d’Hosoda).
• Coco, l’île magique de Keisuke Kotobuki (Ki-oon). Les péripéties d’une jeune magicienne qui provoque toujours des catastrophes.

On peut noter cependant que le manga est plutôt destiné aux pré-adolescents et adolescents (12-17 ans) avec les shōnen (Naruto, One Piece ou encore My Hero Academia) et le shōjo (Card captor Sakura, Fruits Basket ou encore Sailor Moon).

Quelles BD pour les 3-6 ans ?

Il existe peu de BD pour cette tranche de non-lecteurs, destinataires principaux des albums. Toutefois, l’hybridité de l’album jeunesse accueille en son sein des « touches » de BD, avec des bulles et parfois quelques cases.

Voici une petite sélection de premières BD et albums hybrides pleins d’inventivité et de drôlerie :

• Collection les toutous de Dorothée de Monfreid (l’école des loisirs) : Dodo, Le plus gros cadeau du monde, Le meilleur resto du monde…
• Série Ana Ana de Alexis Dormal et Dominique Roques (Dargaud) : les aventures du quotidien de la petite soeur de Pico Bogue.
• Claude et Morino d’Adrien Albert (l’école des loisirs) : duo loufoque d’un jeune bélier et d’un tapir grincheux.

• Série Rita et Machin de Jean-Philippe Arrou-Vignod et Olivier Tallec (Gallimard jeunesse) : encore un duo doux-dingue d’une petite fille et son chien.
• Anuki (éditions de la Goutière) : un petit indien part à la recherche d’un jouet perdu.
• Série Adélidélo de Marie-Agnès Gaudrat (mini BD Kids) : les espiègleries d’une petite fille qui fait beaucoup de bêtises.

• Betty Boum à l’école de Capucine Lewalle (mini BD Kids) : le quotidien d’une petite fille qui aime s’inventer des histoires !
• La suite incroyable (mais vraie) de Boucle d’or et les trois ours de Mathis, une réécriture du conte dans un registre humoristique (Nathan jeunesse).
• Les Trop Super – Kacasting le grand, roi des castors d’Henri Meunier et Nathalie Choux (Actes Sud jeunesse) : des super-héros mènent une enquête sur le tarissement de la rivière…

Premières BD pour les 5-7 ans : initiation

La tranche d’âge des 5-7 ans comporte déjà des enfants lecteurs mais la plupart continuent d’apprécier la lecture par un adulte.

Lire ou ne pas lire les bulles, telle est la question… des parents !

Lire des bulles à un enfant nécessite un peu d’entrainement. Il est plus aisé de lire un album qui ménage des pauses pour observer les images, tandis que dans la BD l’attention visuelle est soutenue. Le parent peut difficilement s’attarder sur les visuels et enchaine le texte avec une oralisation plus saccadée qu’en lecture de texte simple (album ou roman). Toutefois, l’enfant aime que le parent prenne en charge la partie lecture des bulles pour se consacrer aux illustrations. Le parent pointe chaque case pour montrer où il en est et invite l’enfant à ne pas trop anticiper sur la suite « visible ». La tourne des pages d’un album ménageait ce suspens : attendre de tourner la page pour savoir, ce qui n’est pas systématique en BD où l’enchainement des cases sur la page suit une autre logique.

Bien souvent l’enfant connait déjà l’histoire car il a feuilleté la bande dessinée avant que vous ne lisiez les bulles. De même, il apprécie de relire/écouter plusieurs fois une histoire, qu’elle soit en BD ou non. Quand vous lisez, il se repasse le fil narratif et suit attentivement ce que vous dites pour se repérer dans le déroulement de l’histoire. Le sens étant clarifié, l’enfant peut ensuite lire et relire l’ouvrage que vous lui avez lu, pour y retrouver des détails, tâcher de mieux comprendre la trame et les motivations des personnages…

Sélection de BD pour les 5-7 ans

Voici une petite sélection de BD aux thèmes variés qui plaisent souvent aux plus jeunes par leur ton et le soin de leurs illustrations :

• Les petits philosophes, série de Sophie Furlaud et Dorothée de Monfreid (mini BD Kids). Une bande d’amis aux caractères très différents réfléchissent au vivre ensemble et aux questions métaphysiques.
• Zouk la petite sorcière, série de Serge Bloch et Nicolas Hubesch (mini BD Kids). Les espiègleries d’une petite sorcière qui trouve toujours un moyen de réparer ses bêtises, « jusqu’à la prochaine fois »…
• La petite évasion de Dorothée de Monfreid (La Pastèque). Une petite araignée qui n’arrive pas à tisser sa toile est envoyée par sa mère en stage chez un scarabée qui s’avère roublard. Elle convainc ses nouveaux amis cabossés de quitter la décharge pour vivre libres dans la forêt.

• Monsieur Blaireau et Madame Renarde, série de Brigitte Luciani et Eve Tharlet (Dargaud jeunesse). Madame Renarde et sa fille trouvent refuge dans le terrier de la famille blaireau pour échapper aux chasseurs. Vont-ils réussir à s’entendre malgré leurs différences ?
• Jean-Michel série de Magali Le Huche (Actes Sud Jeunesse) : les aventures d’un caribou, super-héros dans son village. Des dialogues qui font mouche, un univers déjanté et joyeux et des personnages secondaires aussi variés qu’attachants.
• Pépère le chat, série de Ronan Badel (Père Castor) : le récit du quotidien d’un chat à qui il arrive forcément des aventures amusantes.

• Le grand méchant renard de Benjamin Renner (Editions Delcourt) : Renard aimerait voler une poule, mais le chien et le coq veillent farouchement sur la basse-cour. Pourquoi ne pas voler des œufs et élever les poussins pour les manger plus tard ? Une BD hilarante et pleine d’humanité qui a été adaptée en animation par son auteur.
• Hôtel étrange, série de Katherine et Florian Ferrier (Sarbacane) : Marietta gère un hôtel pour clients mystérieux et fantastiques avec son majordome fantomatique M. Léclair et Kaki, une créature espiègle et bougonne.
• Crevette d’Elodie Shanta (La Pastèque) : L’apprentie sorcière Crevette va-t-elle réussir son examen de l’école de magie ? Le style d’Élodie Shanta, à la fois simpliste et loufoque, ne laisse pas les enfants indifférents.

Les BD pour les 8-10 ans : aventures et découvertes

Une fois familiarisés avec la lecture de bandes dessinées, les enfants développent leurs propres goûts. Vous pouvez toujours choisir un livre pour eux pour les surprendre ou au contraire leur faire découvrir un nouvel ouvrage qui concorde avec leurs centres d’intérêt. Le choix est pléthorique pour ces jeunes lecteurs qui dévorent du matin au soir les aventures de leurs héros préférés. Certains enfants sont exclusifs, d’autres éclectiques et touche-à-tout, comme les adultes en somme !

Amorcer la lecture pour éveiller l’intérêt

Si vous constatez qu’ils décrochent au bout de quelques pages seulement, proposez-leur de leur lire le début. Certains enfants ont besoin qu’un adulte initie la lecture, crée un horizon d’attente, le fameux : « que va-t-il se passer ? ». L’enfant a forcément envie de savoir… et vous aussi. S’il a révisé son jugement et a envie par exemple de poursuivre la lecture tout seul au moment du coucher, demandez-lui de vous raconter la suite le lendemain matin. Ainsi vous maintiendrez sa motivation et entretiendrez l’effet d’attente.

Par la suite, il aura sans doute envie de vous faire profiter de sa lecture en vous dévoilant l’intrigue. Il pourrait aussi vous proposer de lire vous-même le livre qui lui plait. Ainsi, vous pourrez échanger avec lui, vérifier sa compréhension, faire part de votre interprétation (sans juger la sienne) et pourquoi pas partager ses coups de cœur. De nombreux adultes apprécient la détente procurée par les livres jeunesse. Vous ne parviendrez peut-être pas à vous immerger comme votre enfant mais vous améliorerez votre compréhension de ses émotions et pensées.

10 idées de BD pour enfants de 8-10 ans

• Brume de Carine Hinder et Jérôme Pelissier (Glénat). Curieuse et intrépide, la petite sorcière Brume, flanquée du cochon Hubert et de son ami Hugo, explore la forêt interdite et renoue avec son passé.
• Le temps des mitaines de Loïc Clément et Anne Montel (Dargaud). Dans un monde peuplé d’animaux anthropomorphes où chaque enfant développe un pouvoir en grandissant, le jeune ours Arthur tente de retrouver ses camarades disparus.
• Boubou et ses amis de Yoon-Sun Park (Biscoto) : les aventures d’un ourson et de ses amis dans un univers coloré qui traduit les joies de l’enfance et de l’amitié.

• Zita la fille de l’espace de Ben Hatke (Rue de Sèvres) : BD d’aventure et de science-fiction. Zita tente de sauver son ami Joseph aspiré par un portail interdimensionnel.
• La petite chienne et la louve de Marine Blandin (Biscoto) : alors qu’elle fuit un maitre tyrannique, une petite chienne rencontre son double courageux dans une louve qui l’aide à reconquérir sa liberté. Un récit émouvant sur la résilience et la soif de liberté.
• Le grimoire d’Elfie de Christophe Arleston, Audrey Alwett, Mini Ludvin (Drakoo) : Elfie a hérité du grimoire magique de sa mère. Avec ses deux sœurs, elles entreprennent un long voyage à bord d’un bus transformé en librairie itinérante. Elles croisent sur leur route des personnages aussi attachants que mystérieux.

• Bergères guerrières de Jonathan Garnier et Amélie Fléchais (Glénat). Alors que les hommes ont disparu du village, partis pour une lointaine guerre, les femmes créent l’ordre des bergères guerrières pour protéger village et troupeaux. Molly, apprenti bergère guerrière, pressent une mystérieuse menace et rassemble tout son courage pour défendre les siens.
• Marion Duval d’Yvan Pommeaux (BD Kids). Marion et son père, journaliste, mènent des enquêtes et résolvent des mystères dans des univers variés (vols d’œuvres d’art, disparitions mystérieuses, énigmes historiques…).

• Petit vampire de Joan Sfar (Delcourt). Petit Vampire, un enfant immortel qui vit dans une maison hantée avec une galerie de monstres aussi attachants qu’excentriques, aspire à une vie de garçon normal. Il entraine Michel, un jeune garçon humain, dans ses aventures nocturnes.
• Lightfall de Tim Probert (Gallimard BD). BD d’aventure dans un univers fantastique. Béa vit paisiblement dans le monde d’Irpa, avec son grand-père adoptif, un Cochon-Sorcier gardien de la Flamme éternelle. Lorsque celui-ci disparait, elle n’a d’autre choix que de quitter son confort pour tenter de le retrouver… Heureusement son nouvel ami Cad, une bien étrange créature, est plein de ressources face aux dangers qui l’attend.

Focus sur les BD d’humour jeunesse

Par ailleurs, les BD humoristiques font carton plein chez les enfants entre 6 et 10 ans avec des séries incontournables comme Mortelle Adèle (Mr. Tan, Diane Le Feyer, Miss Pricky) et tous les héros des magazines jeunesse de chez Bayard (BD Kids) : Ariol (Marc Boutavent), Tom Tom et Nana, (Thomas Csillag, Henriette Bichonnier, Yasmine Haddad, Daniel-Rodolphe Jacquette) Anatole Latuile (Clément Devaux, Olivier Muller, Anne Didier), La Cantoche (Nob), Athéna (Sibylline, Frédéric Bageres, Marie Voyelle), Émile et Margot (Olivier Muller, Anne Didier, Olivier Deloye), Kiki et Aliène (Paul Martin, Nicolas Hubesch).

Glénat publie également plusieurs séries d’humour : Alice présidente (Fabrice Colin, Gérald Guerlais), Team Robots (Pog, Thomas Priou, Armelle Drouin), Anette la petite sorcière (Élodie Shanta), La princesse et le grenouille (Philippe Jalbert),… On peut citer aussi l’adorable La famille au Poil d’Ingrid Chabbert et Joëlle Dreidemy publié chez Tschüss.

Sans oublier les classiques au format BD franco-belge :

• Titeuf de Zep (Glénat),
• Les Sisters de Christophe Cazenove et William (Bamboo),
• Cédric de Raoul Cauvin et Laudec (Dupuis),
• Léonard de Bob De Groot et Turk (Le Lombard),
• Les Petits mythos de Christophe Cazenove et Philippe Larbier (Bamboo),
• Boule et Bill de Christophe Cazenove et Jean Bastide (Dargaud),
• Marsipulami d’Andre Franquin, Batem et Marais (Dupuis),
• Kid Paddle de Midam (Dupuis),
• Les Schtroumpfs de Thierry Culliford, Alain Jost, Miguel Díaz Vizoso d’après Peyo (Le Lombard)…

Les BD pour les 9-12 ans : approfondissement et styles variés

Entre 9 et 12 ans, les enfants ont des goûts bien affirmés. Ils apprécient un certain style graphique et un genre narratif en particulier (humour, fantastique, historique…). C’est aussi l’âge où on peut leur proposer d’étendre leur palette et d’explorer des univers différents, notamment la BD éducative.

Voici quelques titres pour vous donner des pistes, dans des univers très différents :

• Pile ou face de H. Larson et Rebecca Mock, (Rue de Sèvres). Entre piraterie et chronique sociale, cette BD fleure bon le sel de mer et les intrigues à la bougie. Un incontournable pour toutes celles et ceux qui rêvent d’aventures trépidantes !
• Les carnets de Cerise de J. Chamblain, A. Neyret (Soleil). Cerise consigne toutes ses observations dans ses carnets et nous livre sa façon de voir le monde. Une série richement illustrée et hyper immersive.
• La Balade de Yaya de J.-M. Omont, C. Giffard, P. Marty, G. Zhao, (Les éditions FEI). Chine 1937, en pleine guerre sino-japonaise, Yaya, une jeune pianiste et Tuduo, un garçon des rues, se lient d’amitié et affrontent ensemble les épreuves et pièges qui jalonnent leur périple.

• Les 5 mondes de A. et M. Siegel (Gallimard). Une BD 100% aventure avec des pouvoirs, des quêtes, le tout dans un univers de science-fiction. Une série addictive aux couleurs réconfortantes.
• Le château des étoiles d’Alex Alice (Rue de Sèvres). Cette série est un bijou d’illustration de style steam punk. Avec son scénario complexe et sa portée historico-politique, cette BD s’adresse à un lectorat aguerri et exigeant.

• Ours de Joe Todd-Stanton et Ben Queen (Kinaye). Le récit touchant d’un chien d’aveugle perdant lui-même la vue et luttant pour revenir chez son maitre.
• Les enfants de la résistance de Benoit Ers et Vincent Dugomier (Le Lombard). Trois enfants résistent avec leurs propres moyens dans un petit village de la France occupé par l’armée allemande.

Petite sélection de mangas pour le 9-12 ans

Au rayon manga, l’offre s’étoffe aussi avec :

• Les classiques de la littérature comme Les misérables de Takahiro Arai (Kurokawa Eds).
• L’histoire : Olympia Kyklos de Mari Yamazaki chez Casterman ou encore Cléopâtre de Natsumi Mukai et Nozomu Kawai chez Nobi Nobi.

• Du fantastique : Frieren de Kanehito Yamada et Tsukasa Abe chez Ki-oon, Les carnets de l’apothicaire de Natsu Hyuuga, Itsuki Nanao et Kurage Neko chez Ki-oon, L’atelier des sorciers de Kamome Shirahama chez Pika, Magnus of the library de Mitsu Izumi chez Ki-oon, Dr Stone Riichirô Inagaki et Boichi chez Glénat, Les minuscules de Takuto Kashiki chez Komikku, Mashle de Hajime Kômoto chez Crunchyroll Kazé…).
• Des tranches de vie : Silver spoon de Hiromu Arakawa chez Kurokawa, Quand Takagi me taquine de Soichiro Yamamoto chez Nobi Nobi…

La bande dessinée constitue un formidable réservoir d’histoires et d’expériences visuelles. Elle contribue à forger les compétences de lecture et procure du bien-être à ses jeunes lecteurs. En librairie ou en bibliothèque, il y a forcément un univers d’auteur qui plaira à votre enfant. Et peut-être avez-vous conservé vos propres trésors d’enfance et les avez-vous transmis à vos enfants ? Quels titres ont leur préférence ? 

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