En tant parent nous nous posons forcément un jour la question de la punition. Et la tentation d’envoyer son enfant au coin est grande. Mais quelque chose au fond de nous nous crie qu’il existe peut-être une autre façon de marquer les limites. Le meilleur moment pour réfléchir à cette question n’est certainement pas juste après une bêtise, mais bien plutôt à froid pour trouver un axe éducatif efficace pour l’enfant. Pour mieux cerner la problématique des punitions, dont celle du coin, il est intéressant d’évaluer cette notion et d’analyser les situations déclenchantes. Que disent les psychologues et pédagogues au sujet des bêtises des enfants ? Quelles « punitions » s’avèrent constructives et comment les mettre en place ?
Punir les bêtises des enfants : quels ressorts éducatifs et psychologiques ?
Le terme de punition se présente d’emblée comme péjoratif et rappelle la domination de l’adulte sur l’enfant. De même, le citoyen est assujetti à diverses obligations légales et fait l’objet d’une amende ou d’une peine en cas d’infraction. Il semblerait que la punition à l’école et à la maison répondent à ce même schéma qui consiste à faire respecter la loi.
Toutefois, les enfants ne contreviennent que très peu souvent à la loi au sens strict. Les punitions qu’ils reçoivent découlent souvent de raisons « plus légères », définies par les enseignants et les parents : se balancer sur sa chaise, renverser son verre sur les cahiers de la grande soeur, refuser de mettre son bonnet… En fonction des familles, les motifs de punition ne sont pas les mêmes et dépendent souvent du degré de patience et de tolérance des adultes. C’est important d’avoir un retour critique sur soi-même pour prendre conscience que bien souvent c’est la colère qui nous pousse à punir. Il est fondamental aussi de se départir du rapport de force entre autoritarisme et laxisme.
Entre tout interdire et tout laisser faire
Pour commencer à défricher le terrain de la punition, on peut se référer à la définition du site Service public. À l’école, la punition consiste en une mesure prise à l’encontre de [l’] enfant en cas de manquement mineur à ses obligations ou en cas de comportement perturbateur. La punition se distingue d’autres mesures pour des faits plus graves : mesure de prévention pour éviter un acte dangereux, mesure temporaire pour garantir l’ordre au sein de l’établissement en cas de procédure disciplinaire engagée contre cet élève. Le dernier échelon convoqué est la sanction en cas de manquement grave ou répété aux obligations de l’élève.
Sur cette base, on peut déjà relever que la punition concerne des faits légers. À la maison et dans les petites classes, ce seront donc tous les actes que nous appelons « bêtises ». Partant de ce principe, la punition apparait comme un moyen de signifier aux enfants des manquements à une règle établie au sein de la famille ou de l’école. Toutefois cette règle recouvre des acceptions très larges et dépend des personnes qui l’édictent. Ainsi, dans certaines familles, les enfants ont le droit de sauter sur le canapé, tandis que dans d’autres non. Ils ont la permission de lire jusqu’à 22h et chez d’autres ce sera 21h etc.
De ce fait, les punitions prévues en cas de non-respect des règles n’interviennent pas dans des circonstances similaires. Et les types de punitions varient également d’une famille à l’autre. Privation de dessins animés, de bonbons, tâche ménagère, isolement… tandis qu’ailleurs les enfants devront « simplement » expliquer leur comportement. Cette différence de punitions, voire l’absence totale de punition, a alimenté de longue date un débat sur l’autorité parentale. Depuis la crise de mai 1968, le laxisme éducatif est régulièrement incriminé pour expliquer les comportements fautifs des jeunes, voire les dérives de la société !
Un jugement à l’emporte-pièce qui masque une réalité évidemment plus complexe. Il suffit d’écouter Boris Cyrulnik, neuropsychiatre spécialiste de l’enfant, pour se rappeler à quelles violences les plus jeunes sont parfois confrontés. Dans une interview accordée à l’association Les maltraitances, moi j’en parle !, , il résume ainsi sa position vis-à-vis de l’éducation bienveillante : “Il y a une chose claire, si on ne cherche pas à faire une éducation bienveillante, il y aura énormément d’enfants maltraités : physiquement, sexuellement, verbalement et socialement, donc il faut chercher à tout prix à faire une éducation bienveillante, sachant que ce ne sera jamais du 100%.”
Alors gardons plutôt à l’esprit l’idéal éducatif du philosophe Hegel, qui incite à trouver la voie moyenne entre une trop grande liberté permise aux enfants et une limitation trop grande de cette liberté (G.W.F. Hegel, Leçons sur le droit naturel et la science de l’État, 1820).
Distinguer les maladresses des bêtises
L’autorité parentale ne fait aucun doute pour éduquer les enfants et donner un cadre à leur liberté. Cette autorité repose sur l’expérience et la capacité d’analyse des situations. Celles-ci déterminent des choix au quotidien, comme se couvrir quand il fait froid, se nourrir de façon équilibré pour être en bonne santé, s’instruire pour développer son intelligence etc. Elles impliquent aussi de respecter les règles de la politesse et de la communication interpersonnelle pour éviter les conflits.
Qu’est-ce qu’une bêtise d’enfant et sur quels critères est-elle déterminée ? Dans un premier temps, il est important d’exclure les maladresses. En tant qu’adulte, nous avons tendance à utiliser l’étiquette « bêtise » pour tous les actes qui provoquent des dégâts. Il en va du verre renversé au bain qui déborde, en passant par le bonnet égaré et le cahier déchiré. De même, l’âge de l’enfant conditionne également la qualification d’un acte en bêtise. Si bébé perd sa chaussette à la crèche, il en aura immédiatement une autre de rechange. Tandis que si un élève de CM1 oublie deux fois de suite son maillot de bain dans les vestiaires de la piscine, ses parents pourraient envisager de le punir…
Ce dernier exemple permet de soulever un point déterminant pour qualifier un acte de « bêtise » : la récurrence. En effet, on considère souvent que c’est la répétition d’une erreur (oubli, dégradation, dégât) qui la qualifie en bêtise. Après un ou deux avertissements, l’enfant est censé apprendre de ses erreurs et ne plus recommencer. Passé ce cap d’apprentissage, l’adulte partira du principe que l’enfant « fait exprès » et c’est cette volonté de « mal faire » qu’il voudra punir. A-t-on raison, a-t-on tort de raisonner ainsi ?
Lorsque les limites franchies provoquent des bêtises graves
De fait, il est bien question ici d’autorité en tant que principe éducatif qui fixe les limites et définit le cadre de la liberté de chacun. Le franchissement de ces limites se cantonne souvent à des faits mineurs. Parfois, leur degré de gravité constitue un motif de consultation en psychiatrie ou psychochologie. Ainsi Ruben Smadja (D’une bêtise à l’autre, 2009) précise dans l’introduction de son ouvrage que [le] terme [de bêtise] est populaire, imprécis, et utilisé par les parents et les enfants ; il n’a pas d’équivalence psychiatrique spécifique. Il condense des significations psychopathologiques et des variétés cliniques largement différentes. Il indique qu’il reçoit en consultation des familles dans lesquelles les bêtises ont un « caractère répétitif et durable », voire présentant une « gravité anormale ».
Parmi les motifs de consultation on trouve les comportements à risque, les colères dévastatrices, les oppositions violentes etc. Lorsque les bêtises atteignent un certain degré de dangerosité et menacent l’équilibre familial, une consultation chez un spécialiste est fortement conseillée. Par le dialogue, le jeu, le dessin, le psychiatre pourra établir un diagnostic et proposer une thérapeutique adaptée à l’enfant. Il en va de sa santé mentale et de celle de ses proches, parents et fratrie. Il est important de consulter au moindre doute, car les punitions données dans le cadre familial pourraient s’avérer contre-productives, voire néfastes et aggraver la situation.
Par exemple, un isolement répété ne fera que renforcer l’angoisse et diminuer les capacités de résilience d’un enfant. D’ailleurs, il est désormais formellement interdit d’exclure un enfant de sa classe dans le couloir. En cas d’éviction, un protocole d’accueil garantit la santé physique et mentale de l’enfant. De trop nombreux accidents ont eu lieu lors de ces moments sans surveillance, pouvant aller jusqu’au décès. Il est donc important de veiller à ce que la punition n’entraine pas un comportement à risque (violence contre soi-même ou pouvant entrainer des blessures). Laisser seul un enfant qui ne sait pas se calmer peut se révéler dangereux. Prudence donc !
Bêtises d’enfant : un catalogue d’expériences nécessaires !
Revenons à des bêtises sans gravité et au moyen de les traiter sous un angle éducatif avec une « punition appropriée ». À l’école, on parle de punition pédagogique et vous trouverez sur le web des sites d’enseignants qui réfléchissent à des punitions « utiles » à leurs élèves.
La punition à l’école doit respecter un cadre réglementaire strict
Par ailleurs, afin d’encadrer et d’aider au mieux les enseignants, le Ministère de l’éducation nationale a édité des documents d’accompagnement. Plusieurs académies, comme l’Académie de Dijon par exemple, explicite les types de contraventions au règlement et punitions possibles. Ainsi, elle fixe quatre principes généraux. Tout d’abord, il convient d’instaurer un dialogue avec l’élève pour entendre ses raisons ou arguments. Ensuite, la punition doit être graduée en fonction du manquement à la règle. Elle sera adaptée à chaque élève en fonction de son degré de responsabilité […] de sa personnalité et du contexte. Dans tous les cas, la punition ne devra jamais être collective. Enfin, il est indispensable qu’une réponse rapide et adaptée soit apportée.
Le document rappelle également quelles punitions sont interdites : aucune sanction en maternelle, hormis un bref isolement sous surveillance. En élémentaire, un élève ne peut être puni pour travail non fait. Autre rappel : Tout châtiment corporel est strictement interdit. Parmi les punitions possibles, l’académie de Dijon recense : les réprimandes, les exclusions, les privations de droits et les réparations.
D’une académie à l’autre, on retrouvera les mêmes recommandations qui suivent les préconisations des psychologues en matière de punition. Il s’agit de faire appliquer le règlement de l’école tout en maintenant le dialogue. L’objectif est que l’enfant comprenne sa faute et ne la réitère pas ! Mais de quelles fautes, erreurs et bêtises parlons-nous ?
©Canva Pro
Florilège (non exhaustif) de bêtises d’enfant
Bien souvent qualifier un acte de « bêtise » est une question de point de vue, celui des parents ou celui des enfants. Voici un petit tableau récapitulatif qui aide à relativiser certains comportements.
Catégorie de bêtises | ce qu’en disent les enfants | pistes d’analyse |
Dégâts | maladresse, « pas fait exprès », « mais ça glisse ! », « j’avais pas vu », « je savais pas » | manque d’attention, étourderie, manque d’organisation, de prévoyance et d’anticipation |
Insolence/manque de politesse | « j’ai oublié », « j’aime pas la voisine », « il a pas dit bonjour non plus », « je m’en fiche », « je fais ce que je veux », « ça m’intéresse pas », « je m’ennuie », « toi aussi, t’en dis des gros mots »,… | réputation de l’enfant et de la famille, risque de mauvais jugement extérieur, manque de souplesse, d’adaptation à différents environnements, remise en cause de l’autorité parentale, ascendant de l’enfant sur l’adulte, correction du langage |
Dispute/colère | « C’est lui qu’a commencé », « j’ai rien fait », « j’l’ai pas vu », « il m’a pris mon robot », « il a volé mon bonbon », « je vais le taper », « j’m’en fiche », « j’vais tout casser », « j’te déteste », « j’veux plus que tu sois ma mère »… | problème de maîtrise de ses émotions, dépassement des limites, dégradation de l’ambiance familiale, surgissement de la violence et de la peur, malaise, mal-être, blessure narcissique, contamination de la colère, surenchère, image de soi, estime de soi… |
Désobéissance/dangers | « j’ai pas peur », « si, j’avais vu », « mais non, ça va, y a rien eu », « je voulais juste rattraper mon ballon », « j’ai pas réfléchi »,… | difficulté à se projeter, difficulté à percevoir les distances et la vitesse (véhicules en approche), mise en danger, comportement dangereux, mise en danger de soi et des autres, manque d’attention, imprudence, manque d’autonomie et de responsabilité… |
Désobéissance/quotidien | « j’suis pas sale », « si, si, j’ai déjà lavé mes dents », « j’arrive ! je termine mon jeu » , « les devoirs, quels devoirs ? », « ah bon, y avait une poésie à apprendre ? » | manque d’organisation, dissimulation, mensonge, non respect du travail scolaire et des obligations quotidiennes (sommeil, repas, hygiène dentaire…)… |
Ce tableau non exhaustif permet de pointer certaines caractéristiques sur lesquelles on peut agir en amont.
Intervenir en amont pour contrer les bêtises
En fonction de la catégorie de bêtises, des solutions préventives existent. En voici quelques-unes qui ont fait leurs preuves en matière éducative :
- maladresses (verre renversé, shampoing vidé…). Pour palier le manque d’autonomie de l’enfant, il faut lui confier des missions pour développer sa motricité et son sens des responsabilités. Il peut s’acquitter de tâches ménagères (mettre la table, appareiller les chaussettes, ranger les livres dans un bac…). En outre, si vous avez un animal, il peut prendre en charge un de ses repas journaliers. Selon son âge, il pourra mesurer la dose de croquettes, remplir la gamelle d’eau, couper les légumes des rongeurs etc. Un enfant maladroit est souvent un enfant à qui on confie peu de tâches. Il a donc très peu d’occasions de s’améliorer… Sauf, si vous mettez en place un système visant à développer ses compétences motrices.
- comportements dangereux. On pointe souvent le manque de maturité pour expliquer les comportements limites des enfants. En effet, ils ne perçoivent pas la réalité comme les adultes. Ils ont du mal à se projeter et à anticiper puisqu’ils vivent essentiellement dans le moment présent. Par ailleurs, ils n’ont pas non plus la nécessité d’être attentifs en dehors de chez eux puisque les adultes y pourvoient. Pour que les enfants apprennent à éviter les dangers, il faut les y confronter par le jeu. Le recours au psychodrame s’avère très utile puisqu’il met l’enfant au coeur de son apprentissage. L’idée est de jouer ou rejouer (si cela s’est déjà produit) la situation « pour de faux ». Cela permet de comprendre plusieurs points de vue et de ressentir les émotions (peur, tristesse) et sensations (douleur). Et on peut recommencer autant de fois que nécessaire pour tester différentes solutions.
- les bêtises liées à un manque de gestion de ses émotions (colère, jalousie, excitation…). Il existe diverses activité tournées vers la maîtrise de soi : yoga, méditation, sophrologie, relaxation et qui favoriseront un retour au calme. En outre, l’humour et l’auto-dérision sont d’excellentes armes pour surmonter la moquerie. Elles se cultivent en famille (blagues, lecture d’histoires drôles, visionnage de films humoristiques) à travers un renforcement du langage et l’acquisition d’un vocabulaire riche.
- les bêtises qui découlent d’un manque d’organisation. Il pourrait être profitable de recourir à des outils de gestion : calendrier, semainiers, tableau de responsabilités (à fabriquer soi-même ou tout prêt comme ceux de l’atelier Gigogne).
Dans tous les cas, maintenir la qualité du dialogue est fondamental dans la relation parent/enfant. Il en va de l’estime de soi et de la confiance en soi de l’enfant. Même s’il est puni, il est essentiel pour son équilibre émotionnel et affectif qu’il ne se sente pas rejeté et mal-aimé. Il doit avoir droit à l’erreur, sinon comment pourrait-il grandir ? Avant de réussir, il faut s’être trompé. Grandir est un parcours d’étapes jalonné de défis qui, une fois relevés, façonnent la force mentale.
L’expérience du coin par les enfants : que disent les spécialistes de l’enfance ?
Revenons à la punition la plus pratiquée dans les familles et sans doute à l’école aussi. Il s’agit de l’exclusion, ou de la mise au « coin ». En cas de comportement limite et perturbateur, cette punition est essentielle pour protéger les autres enfants. Elle peut être utile aussi pour que l’adulte retrouve son calme. La « solution » de l’éloignement parait donc judicieuse lorsqu’elle permet à tous d’éviter les débordements de la colère (violence verbale et physique). Il s’agit donc avant tout d’une mesure de protection.
Toutefois, il faut distinguer exclusion et isolement. La première n’inclut pas nécessairement la solitude, tandis que la seconde renvoie à l’univers carcéral. Symboliquement, le coin c’est comme la prison. D’ailleurs, l’enfant n’a pas le droit d’en sortir tant que l’adulte ne l’y autorise pas. Derrière ses barreaux imaginaires, l’enfant est censé expier ses fautes, les méditer. Il pourra éventuellement demander à sortir du coin lorsqu’il aura pris de la mesure de ses erreurs. Cette expérience du coin est souvent vécue comme une humiliation et une perte de l’amour parental. Alors que l’éloignement dans la chambre ressort d’une mesure préventive (« va dans ta chambre avant que je ne m’énerve ! »).
Par ailleurs, le coin peut aussi être perçu comme une rupture du dialogue et une relégation de l’enfant à son monde. Or, si l’enfant a commis une bêtise, il devrait en toute logique pouvoir la réparer ou du moins participer à sa réparation. C’est pourquoi, il est important que la phase d’exclusion ne dure pas longtemps pour pouvoir renouer rapidement un dialogue constructif. D’abord, pour expliquer ce qui s’est passé, ce qu’on a ressenti puis entrevoir les solutions. Ensuite, pour passer à l’action avec un mot d’excuse pour son grand frère ou un coup de serpillère dans la cuisine.
Si vous voulez vous informer sur la parentalité positive, vous pouvez visionner cet entretien très complet avec Isabelle Filiozat conduit par Fabrice Midal. D’autres conférences passionnantes sont accessibles sur le web, dont celles de Catherine Guegen. Et si vous voulez varier les points de vue, suivez les interventions de Caroline Goldman à la Maison des maternelles et sur France Inter. Elle s’exprime notamment à propos de la punition du coin et lui reconnait une utilité car elle permet selon elle d’éviter « l’écueil des cris, des coups, de la violence verbale et physique, de la rancœur, des débats répétitifs et agressifs qui prennent la place d’autres propositions relationnelles beaucoup plus fondamentales pour les enfants » (Le Monde.fr du 15 février 2023 – source Wikipédia).
Les outils éducatifs pour gérer les bêtises des enfants
Finalement, il faut voir la punition comme une régulation plutôt que comme une sanction. Le contexte de la bêtise devient alors une situation éducative qui conduit l’enfant vers davantage d’autonomie et de sens des responsabilités.
Fixer les limites et règles
Pour commencer, la punition n’a de sens que si elle intervient pour rappeler une règle. C’est pourquoi, il peut être nécessaire d’afficher ces règles. En classe, à chaque début d’année, l’enseignant prévoit une séance pour reparler du règlement intérieur de l’école et de la classe. Un panneau d’affichage présente les règles et punitions éventuelles. Celles-ci peuvent parfois être définies par les enfants eux-mêmes, dans l’optique de les responsabiliser. En outre, certains fonctionnements de classe s’en remettent au groupe pour évaluer les bêtises et décider d’une punition, notamment dans les classes Freinet et Montessori.
En fonction de l’âge des enfants, les règles seront formulées par des pictogrammes, des images avec ou sans texte, du texte écrit et illustré par les enfants/élèves eux-mêmes. Elles seront affichées dans un endroit visible de tous ou accessibles dans un lutin ou classeur.
Matérialiser visuellement les comportements qui dépassent les limites
De même, pour aider un enfant à prendre conscience de son comportement, celui-ci devra être représenté visuellement. En classe, les enseignants usent de nombreux procédés pour alerter leurs élèves sur le franchissement des limites. Il y a par exemple :
- le feu tricolore,
- les gommettes et aimants,
- les étiquettes de prénom à déplacer dans une forme ou couleur,
- l’arbre du comportement,
- le système des ceintures de comportement etc.
La gradation de couleurs ou le déplacement aident à rappeler à l’ordre l’enfant. Hormis faute grave, la punition n’intervient pas immédiatement. L’enfant dispose d’un certain laps de temps pour modifier son comportement. De même, lorsqu’un enfant est dans le « orange », il doit en sortir s’il a fait ses preuves durant la demi-journée. Ce système lui signifie que l’objectif est d’amélioration son comportement et non d’atteindre la punition. En cas d’échec, la punition propose des solutions pour s’amender.
Introspection et dialogue pour transformer les bêtises en apprentissage
Le terme de punition évoque une tâche désagréable, forcément contraignante et déplaisante, une version atténuée des travaux d’intérêt général. Or, elle ne gagne rien sur le plan éducatif à être excessivement pénible. Une punition se doit d’être juste et proportionnelle et ne pas outrepasser le cadre de la bêtise. Par exemple, si l’enfant a inondé la salle de bains, il passera la serpillère dans cette pièce et non dans toute la maison !
Punir positivement c’est avant tout faire preuve de discernement et de mesure afin que la punition répare ce qui a été dégradé. Et dans tous les autres cas de comportements limites (colère, insolence, jalousie, conduite dangereuse), le dialogue constitue la meilleure base de progrès. Toutefois, il est nécessaire de rappeler qu’une fois qu’une règle a été intégrée, les parents ne devraient plus avoir à la justifier. S’il est normal de répéter et d’expliciter les règles à un tout-petit, les grands ne sont plus censés les ignorer. Pour preuve, les grands ne font plus des bêtises de « petit » et innovent avec des bêtises à la mesure de leur âge. Par exemple, ils vont se moquer de leurs frères et soeurs, jeter des bombes à eau sur les passants, finir discrètement tout le paquet de chocolats…
Tous ces comportements nécessitent réprimande et mise au point. Punir les enfants au coin ne serait cependant que de peu d’utilité dans ces cas-là. Au contraire, c’est le dialogue et non l’isolement qui aidera à trouver une solution de réparation. L’enfant a besoin de limites pour se construire et apprendre à se connaître. Il va s’interroger sur les valeurs morales de son comportement. Est-ce que je veux vraiment être celui qui ne partage pas, celui qui est détesté à cause de ses propos méchants ? Comment vivre agréablement tous ensemble au sein de la famille ? Est-ce qu’au final je me sens bien d’avoir fait ça ? Il n’y a que le dialogue parent/enfant qui peut aider l’enfant dans cette quête de soi.
L’acquisition de compétences psychosociales (empathie, adaptabilité, coopération, communication etc.) sont utiles durant toute la vie et passent par cette expérimentation par l’erreur pendant l’enfance.
Communiquer ses émotions à travers divers modes d’expression
Toutefois, les enfants ont parfois du mal à exprimer leurs sentiments et émotions. Cela complique alors le dialogue enfant/adulte, ce dernier ressentant de la frustration face à des échanges limités. On observe parfois une forme de mutisme de l’enfant face aux questions de l’adulte. Celui-ci peut interpréter ce comportement comme une bravade. Or, le plus souvent il n’en est rien. L’enfant se sent piégé et ne sait pas quoi répondre. Du moins, il imagine qu’il doit y avoir une bonne réponse (comme à l’école !) et comme il l’ignore, il préfère ne rien dire plutôt que de risquer d’aggraver son cas.
Même si le principe du dialogue repose sur un équilibre et un partage de la parole, l’enfant se trouve parfois désavantagé. Il ne dispose pas des moyens langagiers suffisants pour comprendre et expliquer son comportement. Chez les adolescents, ce n’est plus le cas et le dialogue peut être vécu comme un affrontement entre parent et jeune. C’est pourquoi dans les collèges et lycées, un personnel spécifique – le CPE – est chargé des relations avec les élèves pour tout ce qui concerne leur quotidien, discipline incluse. À la maison avec les plus jeunes, les parents doivent donc aider leurs enfants à mieux analyser et comprendre leurs comportements. Il faut déjà commencer par explorer ses émotions, en dehors des situations de punition !
Plusieurs activités et outils y contribuent :
- les expressions artistiques corporelles : théâtre, chant, danse, mime, cirque…
- les activités plastiques : dessin, peinture, modelage, sculpture etc.
- les activités écrites : carnet, journal intime.
- les jeux d’imagination avec déguisements ou figurines pour jouer des situations conflictuelles et leur résolution.
- les jeux de société orientés vers les émotions.
- les histoires (lecture silencieuse, lecture du parent à l’enfant, histoires audio).
Ainsi, les punitions éducatives fondées sur le dialogue et la réparation pourront s’appuyer sur une meilleure gestion et compréhension des émotions.
Créer un climat apaisant en classe et à la maison pour prévenir les bêtises
De même, pour que la punition ait du sens et soit efficace – c’est-à-dire avec le moins de récidive possible – elle doit se dérouler dans un climat calme.
Que ce soit à la maison ou à l’école, les enfants ont besoin de sécurité pour grandir sereinement. Cela passe par la formulation et l’explicitation des règles applicables à tous. Mais aussi par l’organisation de temps et de lieux pour se reposer, se ressourcer, se changer les idées. Toutes ces activités favorisent une ambiance collective agréable, propice au respect mutuel et au dialogue. Ainsi, vous pouvez aménager un coin détente ou une cabane dans la chambre ou dans la classe. Vous pouvez aussi organiser :
- des activités de relaxation (maîtrise de son corps, de sa respiration, convocation d’images mentales apaisantes…), de médiation et de retour au calme (méthode d’Éline Snel Calme et attentif comme une grenouille).
- des sorties en plein air (pour se défouler, changer de perspective, s’éveiller à la nature, aiguiser son sens de l’observation pour développer son empathie…).
- des temps de jeu (jeux de rôles, jeux de société) pour apprendre à respecter les règles et les autres joueurs.
- des tâches basées sur la coopération pour reconnaître le rôle de chacun et augmenter l’estime de soi
- etc.
Et chez vous, comment ça se passe ? Quelles sont les bêtises qui reviennent le plus et à quelles punitions éducatives avez-vous recours ? Vous nous dites celles qui fonctionnent le mieux ? Retrouvez-nous sur nos réseaux sociaux FB et Instagram pour échanger vos conseils et astuces !