Depuis l’Antiquité, les plus grands philosophes ont tenté de définir le rire comme le propre de l’homme. Platon, s’en méfiait tandis qu’Aristote précisait que lorsque l’on rit, “la pensée est mise en mouvement en dépit de la volonté la plus ferme“.
Selon Freud, rire fait du bien et Spinoza y voit même une pure joie. Pour l’équipe Merlin, le rire est une philosophie de vie !
Multiple, protéiforme, le rire est avant tout social et universel. De plus, rire en famille présente des vertus bienfaitrices pour surmonter les tracas du quotidien.
Quelques explications sur le rire pour commencer…
D’où vient le rire ?
Le rire est-il vraiment le propre de l’homme comme le pensait Aristote ? Non, les humains ne sont pas les seuls à rire. En effet, les chimpanzés vocalisent une série de sons caractéristiques lorsqu’ils sont en interaction. Il semblerait qu’ils réagissent aux chatouilles de leurs parents puis de leurs congénères. Leur rire émet une sorte d’halètement dû à la position de leur larynx et à la position de leur corps. La mention des chatouilles comme déclencheur n’est pas anodine puisque c’est justement la sensibilité de la peau qui est impliquée. Les batailles de guillis ont une explication scientifique ! La peau détecte le toucher qui renvoie au cerveau une information qui complète le schéma corporel. En effet, la peau agit comme barrière vis-à-vis de l’extérieur et délimite le corps.
Le neurobiologiste Robert Provine* analyse le comportement du chimpanzé en montrant que c’est un signal qui dit à l’autre : “On joue, je ne veux ni t’attaquer ni te faire du mal. C’est un moyen de communication.” Selon lui, “le rire humain est une évolution de ce halètement des chimpanzés.”
Ce chercheur qui a étudié durant 10 ans le rire dans diverses populations pense que le rire humain tire sa particularité de la bipédie. D’après cette hypothèse la position debout libère le thorax et permet d’émettre les sons que l’on connait propres au rire.
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Que se passe-t-il dans le corps quand on rit ?
Quelle que soit la cause du rire, celui-ci implique plusieurs parties du corps qui se mettent en mouvement :
- contractions des muscles du visage (les fameux grand et petit zygomatiques),
- vocalisations accompagnées de spasmes (gloussements, raclements, reniflements, sifflements, déferlement de “ah ah ah”, “oh oh oh” et “hi, hi, hi”…),
- contractions de l’abdomen qui entraînent des mouvements du thorax via les muscles intercostaux (on dit qu’on est “plié de rire”, qu’on se “tient les côtes”),
- accélération du rythme cardiaque sous l’effet d’une respiration saccadée (jusqu’à “s’étouffer” ou “mourir” de rire),
- production de chaleur, rougeur du visage, pleurs (“effusion” de rire comme un volcan en éruption !).
Le langage regorge d’expressions pour décrire ces délicieux moments de détente et de lâcher-prise.
En effet, le rire permet d’évacuer une tension mentale, une émotion, voire un surplus d’énergie. C’est pourquoi, après avoir ri, on peut se sentir fatigué, vidé. Et l’on ressent souvent cette sensation agréable qui vient après le défoulement. Cette décharge d’énergie permet de retrouver le calme et d’aborder plus sereinement les événements à suivre. Il n’est pas rare qu’après avoir ri, un jeune enfant s’endorme paisiblement. Le rire procure un bien-être physiologique à tout âge et se vit souvent dans le partage.
Le rire facilite le quotidien des familles
Quelques activités hilarantes à faire en famille
Les occasions de rire en famille ne manquent pas. Parfois elles surviennent à l’improviste. Mais on peut aussi les provoquer pour passer un bon moment ensemble, “s’en payer une tranche”, comme on dit, avec :
- une course poursuite : en appartement c’est plus risqué, mais ultra-efficace ! Il faut penser toutefois à dégager le parcours de course pour éviter les chutes. Sinon, au parc pour prendre un bol d’air au passage.
- une bataille de coussins : un classique indémodable qui nécessite un peu de rangement…
- la lecture d’histoires drôles : à écouter sur l’enceinte Merlin (voir la sélection “Pour rire”) ou en lecture d’albums. Mention spéciale à la série Cornebidouille de Magali Bonniol et Pierre Bertrand ou encore à Anatole Latuile (qui porte bien son nom !) et évidemment Mortelle Adèle du duo Mr Tan et Diane Le Feyer.
- des chansons rigolotes : on vous laisse choisir, il y en a tellement ! Mais si vous manquez d’idées, allez voir du côté d’Aldebert avec ses Enfantillages et le dernier album produit pour Mortelle Adèle : Show bizarre.
- des jeux d’imitation (pour tous les âges) : par exemple mimer en musique avec le Carnaval des animaux de Camille Saint-Saëns accessible sur votre enceinte Merlin.
Au secours : j’ai besoin de rire !
Parfois les enfants sont sous pression, en colère, fatigués, grognons… La situation semble insurmontable. Et si c’était le moment de rire de soi ? L’autodérision est un bon moyen de relativiser ses petits tracas. Pour les plus jeunes, c’est une démarche assez difficile. Alors que l’enfant est en pleine construction de son identité, il peut avoir du mal à prendre du recul sur lui-même. Ainsi, il aura tendance à se vexer, à se sentir rabaisser, voire impuissant. La maturité compte beaucoup dans l’apprentissage de l’autodérision, ainsi que les modèles parentaux.
Car lorsque nous montrons que nous sommes capables de rire de nos propres défauts et maladresses, nous montrons aussi que nous admettons l’échec. Les enfants vivent de fréquentes situations de frustrations et d’échecs temporaires. Par exemple, lorsqu’ils dessinent, mais ne sont pas contents du résultat, quand ils essaient de nouer leurs lacets sans succès, quand ils écrivent les lettres ou les chiffres à l’envers, ou encore quand ils ne parviennent pas à mémoriser leurs tables. Les exemples ne manquent pas à l’appel ! User de l’autodérision et rire ensemble de ces situations aide à relativiser et accompagne les enfants dans leur développement psycho-affectif.
Faire le pitre, le clown permet justement de rire de soi, sous couvert d’un maquillage et d’un déguisement qui posent un voile de pudeur. En s’inspirant de l’auguste (le bêta) qui joue de ses défauts et maladresses, on peut inviter l’enfant à rejouer ses “bêtises” en portant un masque, un chapeau, une perruque, ou tout autre accessoire qui donnera la distance nécessaire pour s’exprimer librement. Pour se lancer, on peut aussi inverser les rôles et demander à l’enfant de nous imiter. En nous voyant rire de nous-mêmes, il acceptera plus facilement de se remettre en question par l’humour. Lorsque l’enfant éprouve des difficultés à s’exposer directement, on peut jouer avec lui avec des marionnettes ou des sujets (bonshommes, poupées…) qui deviennent alors les vecteurs des émotions. Et dans l’univers du jeu, l’imaginaire et l’humour n’ont pas de limite !
Partager ces moments de rire et d’auto-dérision renforce la complicité parents-enfants et le bien-être en famille !
L’humour aide à surmonter les moments difficiles
Les adultes sont des modèles d’autodérision et d’humour
D’ailleurs, à bien y réfléchir les adultes vivent aussi des situations d’échec face à une nouveauté, ou par maladresse. Le soufflé au fromage qui finit ratatiné dans le fond du plat, la tasse de café renversée sur le cahier de correspondance, la position du chat au yoga qui ressemble plus à une table qu’à un pont…
Si nous montrons dans ces moments-là que nous sommes capables d’en rire, car finalement il n’y a rien de grave, alors nous transmettons une posture positive face à l’échec. On “répare” ses bêtises en nettoyant tout en chantonnant l’air “We will, we will rock you” (il suffit de changer les paroles : “je vais, je vais y arriver !” . Une chorégraphie avec l’éponge est bien sûr possible (et recommandée !). Pas de limite à la créativité une fois l’humour déclenché. Le plaisir du jeu emporte tout avec lui, les larmes et les soucis. Cela permet d’être présent ici et maintenant et d’arrêter de ressasser le passé ou de se projeter négativement.
Dans tous ces cas-là, le rire aide à dédramatiser. Faire preuve d’humour c’est découvrir aux yeux de l’enfant un millefeuille de subtilités. On croyait que c’était nul, que la soirée était fichue, puis finalement non on en a profité pour rire, se détendre et renouer avec la bonne humeur.
Quelques idées de retournements de situations par le rire
Pour trouver des idées, rien de tel que de piocher dans le théâtre et ses différents types de comique en :
- mettant en place des situations de quiproquos, de malentendu, sur le modèle du théâtre de Guignol, avec ou sans marionnettes : “mais où est-il ? Là ? mais je ne vois rien. Ah ici ? Non toujours rien” etc…;
- jouant avec le langage (répétitions volontaires, expressions, patois) : vous avez déjà tenté les morbleu et palsanguene de Molière, les bougrelas et boudouille d’Alfred Jarry ;
- usant de gestes extravagants (chutes pour de faux, mimiques, cache-cache, danse, déguisements loufoques) : sortez vos plus belles grimaces ou décidez-vous pour la cape de la Reine des neiges, à moins que vous n’osiez vous cacher dans le placard à balai ;
- interprétant des caractères pour exagérer les défauts humains (jalousie, colère, stupidité…) : jouer une sorcière, un ogre, un bébé, un professeur etc…;
- imitant les moeurs de notre époque : les gens qui marchent dans la rue avec leur téléphone, les déclarations de personnalités politiques, la queue à la boulangerie…
Voilà une grille complète pour déployer son humour en famille et pourquoi pas se lancer des défis pour jouer ensemble à se faire rire. Il ne voulait pas manger ses petits pois mais une vilaine sorcière a débarqué dans la cuisine pour rafler toute l’assiette d’oeufs de crapauds ? Tout à coup, les petits pois deviennent plus intéressants, il faut défendre sa ration de légumes ! Elle n’arrivait pas à apprendre sa table de 6 ? Et si vous lui proposiez une grimacer différente pour chaque résultat ? En associant l’émotion du rire à l’apprentissage, elle augmente ses chances de mémorisation. À défaut vous aurez vécu une franche rigolade !
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Le rire a-t-il des vertus médicales ?
Depuis longtemps, les médecins reconnaissent les vertus du rire en complément d’une thérapeutique adaptée. Bien sûr, le rire ne soigne pas, mais il rend moins pénibles les séjours des malades dans les structures d’accueil médicalisé. Ainsi l’association “Le rire médecin” existe depuis 1991 et intervient auprès de 83 000 enfants par an dans 55 services pédiatriques. “Avec la complicité du personnel soignant, [les clowns] participent au combat contre la souffrance et l’anxiété, avec leurs armes à eux : le pouvoir du jeu et la force de l’imaginaire. Parfois, une berceuse, un tour de magie ou une pluie de bulles de savon peuvent suffire pour apaiser l’enfant et focaliser son attention sur autre chose.”
Le rire est une distraction qui permet de passer certaines épreuves plus facilement. Alors, lâchez les vannes et laissez-vous submerger par la vague irrésistible du rire. Et plus on est de fous, plus on rit !
Retrouvez la sélection “Pour rire” sur l’application parentale de Merlin pour découvrir des histoires décalées et pleines d’humour. À écouter en toute circonstance !
*Robert Provine, Le rire, sa vie, son oeuvre – Le plus humain des comportements expliqué par la science, Robert Laffont, Paris, 2003