La période des fêtes met particulièrement en lumière la notion de temps et d’attente chez l’enfant. Apprendre à se repérer dans le temps fait partie des compétences visées par l’école. En effet, cette compétence s’inscrit dans un processus d’apprentissage. Il débute en maternelle et se poursuit en primaire avec l’enseignement de l’Histoire.
À l’approche de Noël, de nombreuses familles ont recours au calendrier de l’Avent pour faire patienter les enfants jusqu’au jour tant attendu. Le principe du décompte fonctionne en général assez bien. Dès l’âge de 2 ans, un enfant comprend la règle d’attendre un nouveau jour pour ouvrir une case. À 4 ans, il sait qu’il y a des nombres sur les cases et à 5 ans il est capable d’en identifier certains. À partir de 6 ans, la numération en base 10 et la production de la date sont en cours d’acquisition. Ainsi, le calendrier devient un bon moyen de s’exercer.
Construction de la notion de temps
On a tous en tête ces petites phrases posées à toute heure de la journée : « est-ce que c’est l’heure du goûter ? », « est-ce que c’est un jour d’école ? ».
Nous avons tous expérimenté ces interrogations qui nous font souvent sourire, car les enfants confondent fréquemment matin et après-midi, semaine et week-end. Preuve que la notion de temps, que ce soit sa durée ou son organisation, n’est pas une évidence. Pour aider les plus jeunes à se représenter le temps, on utilise des calendriers, des frises, des éphémérides etc.
L’objectif est double : mesurer le temps et se repérer pour s’organiser et anticiper.
On considère globalement que la notion de temps se construit en étapes :
- vers 2-3 ans, l’enfant comprend la différence entre hier, aujourd’hui et demain, sans toutefois les maîtriser ou les utiliser correctement. À l’école, on privilégie le repérage dans la journée (matin, midi, soir) avec un emploi du temps affiché, stable et utilisant des codes couleurs et des images représentatives. Les rituels d’accueil du matin prévoient d’annoncer le jour et son tantième ;
- à 4 ans, l’enfant maîtrise mieux les repères journaliers et commence à appréhender un passé proche (quelques jours avant ou des périodes de vacances avec des événements marquants) ;
- vers 5 ans, les enfants mémorisent les saisons, les jours de la semaine, connaissent leur date d’anniversaire ;
- à partir de 6 ans, ils se repèrent mieux dans le temps proche. Et abordent progressivement un passé lointain à travers l’enseignement de l’Histoire.
(source : Le développement de notions temporelles par l’enfant)
Difficultés et remèdes pour favoriser l’acquisition de la notion de temps
Construire le « avant » et le « après »
À l’issue de la maternelle, l’enfant se repère de manière satisfaisante dans la journée. Par conséquent, il peut évoquer des situations passées, présentes et futures. En effet, le développement de son langage lui permet de s’exprimer correctement pour raconter ce qu’il a fait au cours des derniers jours ou lors d’instants mémorables. Il ne pourra pas donner de date précise, mais il pourra nommer un événement. Il pourra par exemple reléguer dans le passé ce qu’il a fait avec son précédant enseignant ou ailleurs. « Quand j’étais chez M. Super Prof ou chez Mme Maîtresse magique… », « la dernière fois chez mamie » « quand on était à la mer » etc. C’est à ce moment-là que les enfants nous gratifient du fameux « quand j’étais petit·e » du haut de leurs 6 ans. Ils marquent ainsi une distance temporelle, entre « avant » et « maintenant ».
Les bienfaits de la manipulation pour matérialiser la notion abstraite du temps
Parfois, dans les moments de fatigue ou d’agenda chargé, l’enfant peut éprouver des difficultés à se repérer dans le temps. Il est possible qu’il soit en surcharge cognitive, c’est-à-dire qu’un trop plein d’informations sature ses capacités. Il convient alors de le rassurer par des activités de structuration du temps avec manipulation. Ainsi, il existe de nombreux matériels à fabriquer soi-même ou prêts à l’emploi. L’idée générale est de matérialiser le temps, de rendre visible une notion abstraite. On peut utiliser des bâtons, des billes, des étiquettes à ranger dans des boîtes, à coller sur un tableau etc.
C’est le moment de recycler, tout en étant créatif !
En effet, la manipulation permet de s’approprier des concepts et de mémoriser plus efficacement, surtout lorsque les enfants pratiquent régulièrement des exercices variés. D’ailleurs, il ne faut pas oublier que la notion de temps est une construction sociale. Elle a été inventée par l’homme pour rationaliser son quotidien et dépasser la simple alternance jour/nuit, ce fameux rythme circadien que les bébés atteignent entre 3 et 6 mois.
Même si la maîtrise du temps est théorique, se repérer dans le temps confère de l’autonomie à l’enfant et un sentiment de prise sur le réel qui évolue avec sa maturité.
Gérer l’attente dans diverses situations
Attente et ennui : faire patienter les enfants en toutes circonstances
La gestion du temps est une problématique éducative qui suscite parfois de l’inquiétude. On peut appréhender ces moments d’attente lorsqu’on craint les plaintes, voire les cris ou les bêtises provoquées par l’ennui. C’est pourquoi il convient d’anticiper et de prévoir de quoi leur faire « oublier » qu’ils attendent. Les jeux, livres, dessins et coloriages procurent souvent beaucoup de plaisir aux enfants, ainsi que les temps d’écoute de titres audio adaptés et variés. Lorsque l’enfant parvient à s’aménager une bulle à lui, dans une salle d’attente, dans un coin de salon, dans le train ou dans la voiture…il est capable d’utiliser son temps agréablement et donc d’attendre calmement.
Avec les fêtes, les problématiques liées aux situations d’attente se multiplient. Comment faire patienter les enfants lorsqu’on prépare le repas de fête ? Que l’on s’ennuie dans le train ou en voiture avant d’arriver chez les grands-parents ? Et encore plus : comment attendre plusieurs jours d’affilée jusqu’à l’ouverture des cadeaux ?
Ainsi, le calendrier de l’Avent, quelle qu’en soit la forme, est à la fois un excellent outil de structuration du temps et un bon moyen d’attendre. Il permet d’égrener les jours et de les matérialiser par une case, un sac, une boîte etc. Il invite l’enfant à considérer la durée en comptant le nombre de jours ainsi que l’ordre croissant de ces nombres. De plus, l’enfant passe par la manipulation en faisant appel à sa dextérité pour accéder à sa surprise.
Bref, le calendrier de l’Avent contribue à :
- l’apprentissage de la notion de temps,
- rendre l’attente du Père Noël agréable, et même récompensée.
Recourir à des outils pour aider les enfants à percevoir les durées
La notion de durée est plus longue à se mettre en place que le séquençage du temps qui se déroule selon des scripts stables (début, milieu, fin). Lorsqu’on demande à un enfant d’estimer le temps qu’il a passé à réaliser une activité, ou bien quand on l’invite à prévoir le temps nécessaire à son accomplissement, on le met en difficulté. Les plus jeunes ne disposent pas de repères temporels suffisants pour répondre à ce type de question. Et les élèves de primaire, même lorsqu’ils connaissent le découpage du temps en secondes, minutes, heures, etc. éprouvent également des difficultés à estimer les durées.
C’est pourquoi, il reste difficile pour les enfants de patienter, parfois même jusqu’à la fin du primaire. En fait, ils peuvent se représenter un court temps. Mais au-delà de 10, 20 ou 60 minutes en fonction de l’âge, l’attente semble interminable.
Pour aider l’enfant à construire la notion de durée, le recours à un minuteur a montré son efficacité. Son usage doit néanmoins rester ludique, car il ne s’agit pas de créer un stress inutile. Mais on peut s’amuser par exemple à chronométrer certains gestes quotidiens et se lancer des défis : mettre correctement la table en 1 minute, se brosser les dents en 3 minutes, mettre les sablés à cuire 12 minutes etc. Ainsi, l’enfant s’habitue à intégrer mentalement les durées. Il leur donne du sens et peut les réutiliser à son tour à bon escient. Cette construction progressive va permettre à l’enfant de mieux gérer les situations d’attente.
Par ailleurs, la mise en place de rituels, à l’école et à la maison, rassure les enfants en encadrant et en articulant les différents moments de la journée. Boris Cyrulnik montre que « le rituel aide à la construction de l’identité » (source La Croix du 8/10/2013). Cela peut être une comptine qui accompagne les moments clé de la journée, l’écoute d’une histoire, d’une chanson, d’un documentaire, un jeu (devinettes, quiz, le mot du jour etc.)… Ce sont des habitudes que les parents et éducateurs donnent aux enfants pour leur assurer un cadre stable. Ainsi, ils pourront mieux se connaître, développer leurs capacités et découvrir le monde qui les entoure.